" Eros et amour idéal dans La Marquise d'O... de Kleist "
Résumé
Dans ce récit, le viol est un prétexte qui permet à Kleist de pratiquer un double langage, source d'ironie, de jouer sur l'implicite et le non-dit, et de faire ainsi apparaître les hypocrisies de la société bourgeoise de son temps. Son but n'est nullement de s'intéresser à la réalité du viol. A l'égard de cette tragédie, manifestation de l'esclavage de la femme, il adopte une attitude typiquement masculine. Il minimise, édulcore et laisse entendre que son héroïne était consentante, qu'en fait elle aime son violeur, présenté par ailleurs comme un parfait gentilhomme. Il ne traite donc pas du tout le viol de façon réaliste, et tel n'est pas son propos. Il choisit ce sujet pour son impact scandaleux, sa portée subversive, qui permet de faire éclater les apparences vertueuses, de révéler derrière la façade irréprochable des êtres les sentiments refoulés, les émotions, les pulsions. Kleist donne la parole aux instincts. Il montre qu'on ne peut pas les réprimer et les nier impunément. C'est en cela que consiste le caractère novateur de son message, qui fait de lui un précurseur du freudisme et de l'analyse de l'inconscient.