" Le loup et le berger. Renversement du discours chrétien traditionnel dans Götz de Goethe (1771) "
Résumé
Dans sa pièce de théâtre Götz von Berlichingen, le jeune Goethe adopte une attitude ambivalente à l'égard du discours chrétien. D'un côté, et malgré ses revendications de liberté, ses références à la bible prouvent qu'il ne s'est probablement pas affranchi, autant qu'il le désirait ou le prétendait, de son influence. Il lui emprunte sa vision du monde comparé à une prison, ses métaphores, certaines phrases ou expressions bien frappées. Cependant, il utilise bel et bien sa liberté de créateur pour faire bon marché du sens fondamental des Evangiles et réinterpréter à sa guise leur contenu. Il les prend à contre-pied, en inverse le message, et substitue au christianisme un vitalisme tout puissant, un culte de la nature et de l'individualité d'exception, qui refuse de se plier aux normes. Il fait de son héros l'égal du Christ mais non sa réplique. Loin d'être un apôtre de la douceur, Götz est un guerrier farouche, qui se bat et emploie le plus souvent la force pour l'emporter. Dans cette mesure, il constitue un sorte non pas d'Antéchrist mais de Christ à rebours. Ainsi, par une attitude à la limite du sacrilège et non dénuée d'orgueil, le jeune Goethe prouve son audace de Stürmer, il choque les braves bourgeois. Il va même plus loin. Il se veut annonciateur d'une nouvelle religion et il se sert du moule traditionnel pour donner à celle-ci davantage de réalité et de crédibilité.