, Il ne faut pas, ma chère amie, donner à la botanique une importance qu'elle n'a pas ; c'est une étude de pure curiosité, et qui n'a d'autre utilité réelle que celle que peut tirer un être pensant et sensible de l'observation de la nature et des merveilles de l'univers, p.43

, Loc. cit, p.41

, De même il apprit à faire des lacets pour les corsets des ces jeunes femmes allaitant

, Lettre huitième, pp.90-91

, d'interpréter ou de trancher la question de l'abandon ou non de ses enfants par Rousseau, on notera simplement les qualités « humaines » exceptionnelles qu'il révèle dans les soins prodigués à ces « objets transitionnels » que semblent constituer ses herbiers. Voir sur le dossier de l'abandon l'enquête extrêmement complète de Bernard Gagnebin et Marcel Raymond dans leur édition des Confessions, pp.1416-1422

, Lettre septième, « Sur les arbres fruitiers, p.74

, la procréation on ne peut mieux adressé qu'à une mère de famille désireuse d'élever elle-même ses enfants. Les seules plantes qui n'ont pas trouvé gré aux yeux du philosophe, dans ce catalogue raisonné, sont précisément celles qui, pour des raisons tenant à l'intervention humaine, sont dépourvues de fertilité. Ainsi, dans l'étude des giroflées : Tant que vous les trouverez doubles, ne vous attachez pas à leur examen ; elles seront défigurées, ou, si vous voulez, parées à notre mode, la nature ne s'y trouvera plus ; elle refuse de se produire par des monstres ainsi mutilés ; car si la partie la plus brillante, p.44

, Rousseau reviendra sur le cas de cette « fleur double » à propos des arbres fruitiers, et de la volonté humaine de privilégier la « production » sur la « reproduction » : L'homme a dénaturé beaucoup de choses pour les mieux convertir à son usage : en cela il n'est point à blâmer ; mais il n'en est pas moins vrai qu'il les a souvent défigurées, et que, quand, dans les oeuvres de ses mains, il croit étudier vraiment la nature, il se trompe, La giroflée double, véritable « castrat » de notre civilisation du prestige et de la beauté artificieuse, se présente comme la victime d'un système de valeurs dénaturé, p.45

, Celle-ci n'est-elle pas promise, en effet, grâce au projet maternel, à un avenir « botanique » garant de cette vision « prégnante » (au double sens du terme), du monde, gagnée à la cause fructifère, aux projets agricoles et familiaux à la fois, telle une nouvelle Julie ? La fin ultime de la sexualité, c'est la procréation. La sensibilité qui s'exprime dans ces choix symboliques ne peut manquer de trouver sa résurgence intime à travers une forme d'auto-portrait végétal, marqué justement, pour son propre compte, d'une forme de renoncement mondain et de réinvestissement poétique d'une sensualité qui, justement, échoué parles moyens traditionnels. A propos de l'identification des ombellifères, Il est intéressant de constater qu'un jugement moral, même sans sévérité, s'exerce sur les oeuvres de la nature « détournées » de leur destination première. Mais ces critiques ponctuelles ne forment que l'éloge inversé de la destinataire, mère ambitieuse et aimante d'une petite fille pleine d'avenir, vol.46

, Lettre seconde, p.29

, Lettre septième, pp.75-76

, Lettre cinquième, p.58

, Précisément, sur le chemin semé tantôt d'épines, tantôt de fleurs, qu'est l'initiation, se rencontrent des épreuves engendrées par la méconnaissance ou le préjugé. Ainsi, pour l'apprenti herboriste, ne pas reconnaître tel membre comme appartenant à telle famille, c'est se rendre coupable d'inattention. Certains sujets sont alors rejetés, méprisés, méconnus. Mais eux-mêmes, par leur extérieur, leur rudesse, rendent bien à leurs contempteurs l'universelle rebuffade dont ils sont l'objet. La personnification flagrante du chardon-Roland, si commune « par toute la campagne » et jouissant d'une véritable réputation auprès du peuple, au demeurant « plante de si mauvaise humeur », suggère aisément un autoportrait à la manière d'Arcimboldo. Il n'est jusqu'aux piquants à la consistance de « parchemin » qui n'évoquent le littérateur, le copiste, familier de ce support qui n'a guère contribué à adoucir son contact? Le chardon-Roland (Renou ou René ne furent-ils pas les pseudonymes, choisis ou non, de Rousseau), n'aurait-il pas été choisi pour être l'emblème à la fois du scripteur de ces lettres et de l'auteur des herbiers, figure revêche et sauvage, mais ô combien prolifique ? En effet, il « n'a guère le port d'une ombellifère, et néanmoins c'en est une, puisqu'il en a tous les caractères dans sa fructification » : fécond, il s'est donc répandu, mais, à défaut d'avoir enfanté de la manière traditionnelle -en s'entourant d'une famille affectueuse et protectrice -c'est en se dupliquant à l'infini dans les mêmes traits rébarbatifs, selon un schéma pédagogique qui possède ses détracteurs, L'attention inhabituelle portée à la description un peu anachronique de cette plante horsnorme, hors-catalogue, puisqu'elle outrepasse les caractéristiques reconnaissables de la famille des ombellifères (objet de la description), fait symptôme

, Le philosophe est en effet renversé par un « gros chien danois » accompagnant un carrosse. Juste avant l'accident, c'est la mélancolie qui a envahi le promeneur au contact de sa dernière cueillette de l'année, et c'est presque un homme-herbier, déjà desséché par la vie, qui arpente les chemins du faubourg : Je me voyais au déclin d'une vie innocente et infortunée, l'âme encore pleine de sentiments vivaces et l'esprit encore orné de quelques fleurs, Ce rugueux portrait nous renvoie à un détail de la Deuxième promenade, véritable poème en prose à l'intérieur des Rêveries

, Le choc provoqué par le chien le plonge dans une sorte d'évanouissement d'où seules émergent quelques sensations

L. Nuit-s'avançait and . De-verdure, Je ne me sentais encore que par-là. Je naissais en cet instant à la vie, et il me semblait que je remplissais de ma légère existence tous les objets que j, p.48

, Ces sensations sont paradoxalement délicieuses. Homme-herbier, homme-plante, hommechardon, Jean-Jacques renaît tel Antée au contact de la terre

O. Rêveries, Deuxième promenade, p.1004

. C. Op, C'est nous qui soulignons, p.1005